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Goliarda Sapienza
Mots, idées, concepts, personnalités repérés : martyrologie et messianisme prolétariens L'art de la joie L'université de Rebbidia Éditions Le tripode Du site : «L’Université de Rebibbia est le récit du séjour que fit Goliarda Sapienza dans une prison romaine en 1980. Moment critique dans la vie de l’auteur : après s’être consacrée de 1967 à 1976 à l’écriture du monumental roman L’Art de la joie et avoir fait face à un refus général des éditeurs italiens, c’est une femme moralement épuisée qui intègre l’univers carcéral de Rebibbia, la plus grande prison de femmes du pays. Pour un vol de bijoux qu’il est difficile d’interpréter : aveu de dénuement ? Acte de désespoir ? N’importe. Comme un pied de nez fait au destin, Goliarda va transformer cette expérience de l’enfermement en un moment de liberté, une leçon de vie. Elle, l’intellectuelle, la femme mûre, redécouvre en prison – auprès de prostituées, de voleuses, de junkies et de jeunes révolutionnaires – ce qui l’a guidée et sauvée toute sa vie durant : le désir éperdu du monde. L’Université de Rebibbia est un nouveau tour de force dans l’œuvre d’une femme au parcours décidément hors norme. Il fut immédiatement perçu comme un texte important en Italie. Publié par la prestigieuse maison d’édition Rizzoli, le livre fut accueilli avec enthousiasme par la critique et le public. On découvrait avec étonnement une écrivaine déjà âgée, partageant avec drôlerie et férocité son expérience d’une prison qui, pour reprendre ses mots, « a toujours été et sera toujours la fièvre qui révèle la maladie du corps social ». Ironie de l’histoire, L’Université de Rebibbia deviendra ainsi le premier succès de Goliarda Sapienza. Et son dernier. Malgré les bonnes ventes du livre, Rizzoli maintint son refus de publier L’Art de la joie, condamnant encore pour plusieurs années ce texte à l’obscurité d'un tiroir. Goliarda Sapienza (1924-1996) est née à Catane. Elle ne trouve la reconnaissance qu’après sa mort, avec le succès en 2005 de la traduction en France du roman L’Art de la joie. Le Tripode s'est engagé dans la publication de ses œuvres complètes.» Pages 74-75 «... cette leçon que l'homme connaît depuis des siècles, inscrite dans sa biologie : ne jamais se coltiner les désirs inconscients des autres, pilotés par le génie maléfique de la centrifugeuse. Les détenues elles-mêmes, moi comprise, sont des agents inconscients du génie de la centrifugeuse, comme à l'extérieur le sont tous les citoyens. Sauf que dehors tout est plus caché. Parfois on met des années à découvrir, pour donner des exemples, qu'un réalisateur extraordinaire, un acteur irrésistible entièrement voué à son art, un brillant journaliste, ne sont que des agents inconscients du génie de la centrifugeuse sociale. Le Capital ne s'appuie plus sur les guerres au nom de la Patrie, mais sur la persuasion démocratique, véritable bombe atomique réduisant à zéro toutes les différences. On le sait. Ça nous convient, à nous, organismes anciens enfermés dans des enveloppes préindustrielles, cette prison où du moins la guerre est encore une confrontation individuelle, un corps à corps à la baïonnette ou au poignard.» 113-114 ««Tu connais les vieux de ma génération ? Je ne pensais pas», m'entends-je dire sottement. « Bien sûr ! Nous ne voulons pas faire l'erreur des soixante-huitards ! » « Quelle erreur ? » « Celle de nier le passé : ça les a conduits à un isolement utopique dans lequel beaucoup sont morts, et ceux qui ne sont pas morts ont été obligés de se réinsérer et de faire précisément ce qu'ils avaient rejeté si fort...» 117 «Je me suis depuis si peu de temps échappée de l'immense colonie pénitentiaire qui sévit dehors, bagne social découpé en sections rigides de professions, de classes, d'âges, que cette façon de pouvoir brusquement être ensemble - citoyennes de tous milieux sociaux, cultures, nationalités - ne peut que m'apparaître comme une liberté folle, insoupçonnée.» 149-150 «Roberta est d'avis que ça n'a pas de sens de tourmenter ces malheureuses avec de prétendus films engagés, parce que pour elles ce sont justement ceux-là qui reflètent le plus le projet d'anéantissement de l'âme du peuple. Marcella est d'accord : rien de ce qui est exprimé par l'establishment n'échappe à la censure ou à la loi du profit, qui ne peut qu'être réactionnaire dans sa nécessité de plaire aux masses, donc mieux vaut La Mazetta (Le pot de vin - Film policier de 1978) qu'on a projeté hier, qui au moins rend gai et finalement dit quelque chose entre les lignes. Là dessus, toutes sont d'accord : il n'y a que dans les films comiques qu'on trouve quelques lueurs de critique contre le pouvoir.» Mars 2021 L'art de la joie Désolé je me suis arrêté à la moitié, page 293 de l'édition Viviane Hamy 2005. Elle a bien raison d'exprimer sa liberté, y compris sa sexualité, mais je me suis lassé de sa recherche de plaisir. La relation physique d'un adulte avec l'autre n'est-elle pas perturbée par ce viol subit enfant ? La fillette pauvre qui devient riche, je ne crois pas que ce soit l'idéal que défendait sa mère militante socialiste dans les années 20 et 30 du XXe siècle. Et je trouve qu'il y a peu d'échos sur les évènements de l'époque. C'est sûr que le retard de l'édition est dû à la description de l'inceste, qui a dû contrarier les hypocrites, et dû à la description de la vie dans un couvent, qui a dû chagriner le clergé et ses grenouilles. Une recension Trois raisons de (re)lire “L'art de la joie” J'ai retenu deux passages : Page 122 «La peur et l'humiliation sont les germes de la haine et de l'hostilité.» 204 La martyrologie et le messianisme prolétariens «... chez tes camarades je n'ai trouvé qu'aspiration mal dissimulée à la sainteté et vocation au martyre. Ou la férocité du dogme pour cacher la peur de la recherche, de l'expérimentation, de la découverte, de la fluidité de la vie. Si tu veux le savoir, je n'ai rien trouvé qui ressemble à la liberté du matérialisme. Et je me suis enfuie, oui, parce que je n'avais pas l'intention de tomber dans un piège peut-être pire que l'Église à laquelle j'ai échappé. - Mais Modesta, tu te rends compte ? Tu nies le sacrifice et l'abnégation de ceux qui luttent pour la cause du prolétariat, pour une société meilleure sans différence de classes, sans l'exploitation de l'homme par l'homme, sans... - Je ne nie aucun combat ! Je critique une tournure de pensée trop peu différente de celle de l'ancien monde que vous voulez combattre. En pensant comme vous pensez, dans la meilleure des hypothèses, on construira une société qui sera une copie, de mauvaise qualité par-dessus le marché, de la vieille société chrétienne et bourgeoise. - Mais il faut du temps pour les transformations profondes. Il faut d'abord faire la révolution pour renverser la bourgeoisie et changer les rapports de production. Tout le reste, après, viendra de lui-même parce que les superstructures créées par l'idéologie bourgeoise tomberont....» Mars 2021 Haut de page Page en amont Des visites régulières de ces pages mais peu de commentaires. 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