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Témoignages

Marguerite Audoux

Jacques Rossi Le Français qui a fait 24 ans de goulag

Joseph Ponthus



Marguerite Audoux (1863 - 1937)

Tiré de France Culture Entendez-vous l'éco ? par Tiphaine de Rocquigny
«La Belle Époque l'a-t-elle été pour tout le monde ? Ce n'est pas ce que laisse entendre la lecture de Marguerite Audoux, romancière issue des classes défavorisées, avec qui nous découvrons le côté sombre d'une époque marquée par l'extravagante richesse comme par la misère.
Née en 1863 et morte à 74 ans en 1937, Marguerite Audoux vit pleinement la transition entre les deux siècles. Loin d’être le témoin du Paris des Lumières et du luxe qui imprègne progressivement la société de son époque, elle en relate au contraire les dessous, et couche sur le papier les réalités d’une orpheline élevée dans le labeur à la campagne puis celles d’une jeune femme débarquant à la capitale, forcée de gagner sa vie pour ne pas mourir de faim. 
Avec la publication en 1910 de son premier roman, Marie-Claire, grâce à la rencontre avec les intellectuels du cercle de Carnetin, elle bénéficie d’une double notoriété :  elle est à la fois femme et issue de la classe populaire. « Écrire n’était pas son métier, seulement le moyen qu’elle avait trouvé d’esquiver les coups de la vie, de monter. De monter pour mieux respirer, de monter pour vivre. » dira ainsi son ami Francis Jourdain.
Toute la force des romans de Marguerite Audoux vient du fait que les conditions de travail y sont simplement suggérées. Ça se fait par touches, de façon non dogmatique. C’est ainsi que Marguerite Audoux fait de la politique. - Sarah Al-Matary
Son récit est loin de tout militantisme : elle ne dénonce pas, elle décrit. « On a qu'à lire mes bouquins, on verra qui je suis et ce que je pense des fortunés et des miséreux. » dit-elle. Si Marie-Claire est fortement autobiographique, Marguerite Audoux se détache de son personnage dans son deuxième roman, L'Atelier de Marie-Claire, dans lequel elle raconte l'histoire d'un atelier de couture et des petites mains qui le font tourner tant bien que mal. 
Marguerite Audoux n’est pas une militante, elle refuse tous les drapeaux, tous les honneurs. Elle ne se battra jamais au nom d’une cause. Pour elle, défendre une bonne cause pas la violence devient une mauvaise cause. - Bernard-Marie Garreau
Que nous dit Marguerite Audoux de cette prétendue Belle Époque, derrière laquelle se cache une bonne part de misère ? Pour découvrir le côté sombre de cette période de l'histoire qui a laissé une bonne partie de ses contemporains dans la pauvreté, nous accueillons Bernard-Marie Garreau, maître de conférences à l'Université d'Orléans et ancien directeur du CRELLIC, Centre de recherche en littératures, linguistique et civilisations, à l'Université de Bretagne-sud ainsi que Sarah Al-Matary, maître de conférences en littérature à l’université Lyon.»


Tirés des pages de l'édition Les cahiers rouges - Grasset
Page 226 «...- Puisque nous travaillons davantage dans les moments pressés, nous méritons de gagner davantage.
M" Dalignac remua la tête comme lorsqu'on sait une chose impossible, et Bergeounette se moqua:
- Tu voudrais faire une révolution, peut-être ?
Bouledogue découvrit ses dents, et sa voix roula un peu pour répondre :
- Le travail ne devrait jamais être une peine.
Je savais que M"' Dalignac était sans défense contre les exigences de ses clientes, et que réclamer le prix de ses façons était pour elle un gros ennui. Mais ce que venait de dire Bouledogue me paraissait si juste que je m'apprêtais à lui donner raison, lorsque Bergeounette me devança :
- Voilà celle-ci qui va prêcher maintenant.
Ce n'était pas la première fois qu'elle me faisait ce reproche, aussi j'en restai confuse...»
286 La chanson Le vin de Marsala :
Nous étions au nombre de mille
Venus d'Italie et d'ailleurs
Garibaldi, dans la Sicile
Nous conduisait en tirailleurs
J'étais un jour seul dans la plaine
Quand je trouve en face de moi
Un soldat de vingt ans à peine
Qui portait les couleurs du roi
Je vois son fusil se rabattre
C'était son droit, j'arme le mien
Il fait quatre pas, j'en fais quatre
Il vise mal, je vise bien.

Ah! Que maudite soit la guerre
Qui fait faire de ces coups-là
Qu'on verse dans mon verre
Le vin de Marsala!
...
Je voulus panser sa blessure
J'ouvris son uniforme blanc
La balle, sans éclaboussure
Avait passé du cœur au flanc.
Entre le drap et la chemise
Je vis le portrait en couleurs
D'une femme vieille et bien mise
Qui souriait avec douceur.
Depuis, j'ai vécu Dieu sait comme,
Mais tant que cela doit durer
Je verrai mourir le jeune homme
Et la bonne dame pleurer.
Le soldat de Marsala par Marc Ogeret https://www.youtube.com/watch?v=PRSVS6UVCZQ
291 Pas de congés payés. L'été deux mois de congé non payés? 71 ans sans retraite. Un salaire juste pour survivre.
293  cette «vieille» de 71 ans «... sa mâchoire n'avait que deux dents ...»
317 Pendant une veillée d'ouvrages pour contenter ces Dames exigeantes, qui vont se pavaner le 25 décembre à la messe ou dans les salons, les couturières chantent pour se donner de l’entrain. Les chants de Noël rapportés de leur pays est aussi un moyen d'exprimer la solidarité naturelle entre «petites» gens.
«Presque toutes gardaient un noël au fond de leur mémoire. La grande voix de Bouledogue fit entendre un air enfantin qu'elle avait appris à l'école, et personne ne se moqua de celui que Roberte entonna d'une façon tout à fait ridicule.
La douce voix de Mme Dalignac s'éleva aussi, et je me souvins moi-même d'un noël où l'on voyait les bergers solognots quitter leur troupeau pour aller porter des présents à l'enfant divin.
Sylvain lui porte un agnelet,
Son petit-fils, un pot de lait
Et deux moineaux dans une cage
Robin lui porte du gâteau,
Pierrot lui porte du fromage
Et le gros Jean, un petit veau.
La nuit était très avancée lorsque les vêtements furent terminés, mais personne n'en fit la remarque. Les tabourets furent rangés avec bonne humeur, et la descente de l'escalier fut pleine de rires. Un froid vif nous surprit en bas. La lune haute et brillante éclairait l'avenue, comme si quelqu'un l'eût allumée exprès pour cette nuit de fête.»
Vers que j'ai retrouvés dans un «Vieux Noel d'Anjou» http://rienquedeschats.canalblog.com/archives/2014/12/24/31076493.html

Lecture de février 2021


Joseph Pontus (1978 - 2021)
Éditions La table ronde https://www.editionslatableronde.fr/

Quatrième de couverture : «À la ligne est le premier roman de Joseph Ponthus. C’est l’histoire d’un ouvrier intérimaire qui embauche dans les conserveries de poissons et les abattoirs bretons. Jour après jour, il inventorie avec une infinie précision les gestes du travail à la ligne, le bruit, la fatigue, les rêves confisqués dans la répétition de rituels épuisants, la souffrance du corps. Ce qui le sauve, c’est qu’il a eu une autre vie. Il connaît les auteurs latins, il a vibré avec Dumas, il sait les poèmes d’Apollinaire et les chansons de Trenet. C’est sa victoire provisoire contre tout ce qui fait mal, tout ce qui aliène. Et, en allant à la ligne, on trouvera dans les blancs du texte la femme aimée, le bonheur dominical, le chien Pok Pok, l’odeur de la mer.Par la magie d’une écriture tour à tour distanciée, coléreuse, drôle, fraternelle, la vie ouvrière devient une odyssée où Ulysse combat des carcasses de bœufs et des tonnes de bulots comme autant de cyclopes.»

Une recension de Ramsès Kefi - Libération L’épreuve de l’usine


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