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George Orwell - Ses témoignages Une édition de qualité où l'on trouve, je pense, la plupart des ouvrages de George Orwell : éditions ivrea - Champ libre Par leurs choix, du papier, de la mise en pages, du format rendent la prise en main et la lecture agréable. La qualité de ces ouvrages ne peuvent qu'être utile pour la diffusion de ces textes importants dans la connaissance des liens et tiraillements politiques intemporels. Une autre source pour d'autres textes et analyses, les éditions AGONE Dans la dèche à Paris et à Londres Le quai de Wigan Hommage à la Catalogne Une fille pasteur Et vive l'aspiditra 1984 Le quai de Wigan Deux parties dans cet ouvrage. D'abord il décrit les conditions de travail et de vie des mineurs dans le nord de l'Angleterre, ensuite la situation des mouvements et partis politiques de luttes sociales et les risques nazi-fascistes d'avant guerre. Quelques citations et observations (pagination de l'édition Ivrea) - Traduction Michel Pétris Première partie Pages 56-57 «Il se sent le jouet d'une mystérieuse autorité supérieure qui l'entretient dans la conviction bien ancrée qu'«on» ne le laissera faite ci ou ça. ... Je demandais pourquoi ils ne constituaient pas un syndicat. Ils me répondirent qu'«on» ne le leur permettrait jamais. Qui est ce «on» ? ... Personne ne put me fournir de réponse. Mais apparemment ce «on» était tout-puissant.» Page 58 Dans les maisons des mineurs construites pour les loger «... personne n'imaginait qu'un mineur puisse avoir envie de prendre un bain.» 85 Déjà des manipulations sur les chiffres du nombre de chômeurs. 95 En 1937 la guerre comme solution pour effacer misère, chômage et risques de révoltes ! 97 Vision des chômeurs responsables de leur situation ... fainéants ... parasites ... 122 La laideur apportée par l'industrialisation sans éthique ; la «noire fabrique de Satan» d'Aldous Huxley. 126 Vision des «autres» par une certaine propagande anglaise : «... vivre et ne rien faire au milieu des olives, des vignes et des vices.» Deuxième partie 180 Pillage des colonies : pour «jouir d'un certain confort, il faut impérativement que cent millions d'Indiens vivent continuellement au bord de la famine» pour «déguste[r] une assiette de fraises à la crème». 196 et 206 Il y va un peu fort sur ses descriptions des militants travaillistes ou autres communistes. Pourquoi ce mépris pour ces apparences. Y voit-il une contradiction entre des revendications sociales et les habitudes alimentaires et vestimentaires ? 200 et ailleurs «... l'aspect philosophique du marxisme, avec sa mystérieuse trinité thèse-antithèse-synthèse». 211-212 concept de socialisme indissociable du concept de machinisme qui «exige ... une intercommunication constante et un échange perpétuel de marchandises entre les différents points du globe.» 212-213 Vision pour certains du socialisme de demain tout compte fait comparable au capitalisme d'aujourd'hui. Un messianisme par le progrès technique. 226 « Il n'y a vraiment aucune raison impérative pour qu'un être humain fasse autre chose que manger, boire, dormir, respirer et procréer ; tout le reste pourrait être fait par des machines qui agiraient à sa place. C'est pourquoi l'aboutissement logique du progrès mécanique est de réduire l'être humain à quelque chose qui tiendrait du cerveau enfermé dans un bocal. Tel est l'objectif vers lequel nous nous acheminons déjà, même si nous n'avons, bien sûr, aucunement l'intention d'y parvenir : de même qu'un homme buvant quotidiennement une bouteille de whisky ne le fait pas dans l'intention bien arrêtée d'y gagner une cirrhose du foie. La fin implicite du progrès, ce n'est peut-être pas tout à fait le cerveau dans le bocal, mais c'est à coup sûr un effroyable gouffre où l'homme - le sous-homme - s'abîmerait dans la mollesse et l'impuissance. » Cité par Jacques Bouveresse 229 «A l'image de la drogue, la machine est utile, dangereuse et créatrice d'habitudes. Plus on s'y adonne, plus son emprise se fait tyrannique.» 229 Déjà à l'époque des pommes d'Australie standardisées et insipides. 233 Le roi de Brobdingnag est un personnage du roman Les voyages de Gulliver de Jonathan, Swift. Hommage à la Catalogne « J’étais venu en Espagne dans l’intention d’écrire quelques articles pour les journaux, mais à peine arrivé je m’engageai dans les milices, car à cette date et dans cette atmosphère il paraissait inconcevable d’agir autrement. Les anarchistes avaient toujours effectivement la main mise sur la Catalogne et la révolution battait encore son plein. Sans doute quiconque était là depuis le début devait avoir l’impression, même déjà en décembre et en janvier, que la période révolutionnaire touchait à sa fin ; mais pour qui arrivait alors directement d’Angleterre, l’aspect saisissant de Barcelone dépassait toute attente. C’était bien la première fois dans ma vie que je me trouvais dans une ville où la classe ouvrière était en selle. A peu près tous les immeubles de quelque importance avaient été saisis par les ouvriers et sur tous flottaient des drapeaux rouges ou les drapeaux rouge et noir des anarchistes ; pas un mur qui ne portât, griffonnés, le marteau et la faucille et les sigles des partis révolutionnaires ; il ne restait de presque toutes les églises que les murs et les images saintes avaient été brûlées. Ça et là on voyait des équipes d’ouvriers en train de démolir systématiquement des églises. Tout magasin, tout café portait une inscription vous informant de sa collectivisation (…). Personne ne disait plus Señor ou Don, ni même Usted ; tout le monde se tutoyait, on s’appelait « camarade » (…) Et le plus étrange de tout, c’était l’aspect de la foule. A en croire les apparences, dans cette ville les classes riches n’existaient plus. A l’exception d’un petit nombre de femmes et d’étrangers, on ne voyait plus de gens bien mis. Presque tout le monde portait des vêtements de prolétaires, ou une salopette bleue, ou quelque variante de l’uniforme de la milice. Tout cela était étrange et émouvant. Une bonne part m’en demeurait incompréhensible et même, en un sens, ne me plaisait pas ; mais il y avait là un état de choses qui m’apparut sur-le-champ comme valant la peine qu’on se battît pour lui. » Et aussi en format poche https://www.10-18.fr/livres/litterature-etrangere/hommage_a_la_catalogne-9782264030382-3/ La participation d'Éric Blair à la guerre civile espagnole en 1937 et son témoignage sur la lutte des communistes contre les militants et combattants du POUM dans Barcelone.Il en a rapporté un dégout des dictatures. Quoique en pense certains il est resté sur ses convictions du rejet des injustices sociales et un amour de l'humanité sans exclusive. Les derniers mots : «Ici, c’était toujours l’Angleterre que j’avais connue dans mon enfance : des talus de voie ferrée enfouis sous l’exubérance des fleurs sauvages, des prairies profondes où de grands et luisants chevaux broutent et méditent, de lents cours d’eau frangés de saules, les vertes rondeurs des ormes, les pieds-d’alouette dans les jardins des villas – et puis ce fut la morne immensité paisible des environs de Londres, les berges du fleuve boueux, les rues familières, les affiches parlant de matches de cricket et de noces royales, les hommes en chapeau melon, les pigeons de Trafalgar Square, les autobus rouges, les agents de police bleus – tout cela plongé dans le profond, profond, profond sommeil d’Angleterre, dont parfois j’ai peur que nous ne nous réveillions qu’arrachés à lui par le rugissement des bombes.» Georges Kopp son ami belge s'en est quand même tiré : Georges_Kopp Une fille de pasteur https://www.livredepoche.com/livre/une-fille-de-pasteur-9782253122661 4ème de couverture : «Fille unique, Dorothy vit une existence morne avec son père, le pasteur acariâtre d’une petite paroisse du Suffolk. Frappée par une soudaine amnésie, elle se retrouve à la rue et va partager l’existence des déshérités, des clochards de Londres aux cueilleurs saisonniers de houblon. Mais, à mesure que la mémoire lui revient, Dorothy trouvera-t-elle en elle-même la force d’aspirer à une autre vie ? Publié en 1935 et inédit en français jusqu’en 2007, Une fille de pasteur est l’un des premiers romans de George Orwell. Avec une lucidité et une acuité implacables, Orwell dépeint l’hypocrisie, la pauvreté et la misère spirituelle qui vont accompagner Dorothy dans son odyssée à travers l’Angleterre des années 1930.» Par ce roman il nous fait partager la cueillette du houblon, tâche ingrate sous payée qu'il a partagée avec ses compagnons de misère, SDF et clochards, et leur vie dans la rue à Londres : Page 146-147 «Le petit déjeuner était toujours le même : du bacon, du thé et du pain frit dans la graisse du bacon. Tout en mangeant, on préparait un repas exactement similaire pour le déjeuner, puis, son seau à repas sous le bras, on partait pour les houblonnières, à deux kilomètres, dans l'aube bleue et venteuse, et on avait le nez qui coulait tellement dans le froid qu'on était parfois obligé de s'arrêter pour l'essuyer à son tablier de toile. Les houblons étaient répartis en plantations d'environ un demi-hectare et chaque équipe - une quarantaine de cueilleurs aux ordres d'un chef qui était souvent un gitan travaillait dans une plantation à la fois. Les plants, qui atteignaient trois mètres et demi ou plus, poussaient sur des cordes et pendaient par-dessus des fils de fer horizontaux, en rangées d'un ou deux mètres de distance ; dans chacune d'elles, il y avait une boîte à fond de toile qui ressemblait à un hamac très profond suspendu à un lourd cadre de bois. Dès qu'on arrivait, on mettait sa boîte en place, coupait les cordes des deux plants suivants et on les arrachait - des feuillages énormes et fuselés, comme les nattes de Raiponce, qui s'abattaient en vous faisant prendre une douche de rosée. On les traînait jusqu'au-dessus de la boîte, et là, à partir du gros bout du plant, on commençait à arracher les lourdes grappes de houblon. A cette heure matinale, la cueillette ne pouvait être que lente et maladroite. Les mains étaient encore raides, la rosée froide les engourdissait et les cônes de houblon étaient humides et glissants. La difficulté principale était de les cueillir sans les feuilles et les tiges, car le mesureur était en mesure de refuser le houblon s'il y avait trop de feuilles. Les troncs des plants étaient couverts d'épines minuscules qui mettaient les mains en bouillie en deux ou trois jours. Le matin, c'était une torture de commencer la cueillette quand les doigts étaient presque trop raides pour se plier et saignaient en une dizaine d'endroits, mais la douleur s'apaisait lorsque les coupures s'étaient rouvertes et que le sang coulait en abondance. Si le houblon était de bonne qualité et si on le cueillait bien, on pouvait dépouiller un plant en dix minutes, et les meilleurs plants produisaient un demi-boisseau de houblon. Mais la qualité des cônes de houblon variait beaucoup d'une plantation à l'autre. Dans certaines, ils étaient gros comme des noix et pendaient en grandes grappes sans feuilles que l'on pouvait arracher d'une simple torsion ; dans d'autres, c'étaient de petites choses minables pas plus grosses que des petits pois et qui poussaient si parcimonieusement que l'on devait les cueillir un à un. Certains cônes étaient de si mauvaise qualité qu'il fallait plus d'une heure pour en cueillir un boisseau.» Et dans le chapitre 1 de la 3ème partie nous sommes témoins d'un dialogue entre Charlie, Sourdingue, Carotte entre autre et Dorothy. Essayant de se réchauffer et n'ayant pas le droit de s’allonger, bougent, chantent, se plaignent et font les pitres avant de partir au petit matin vers des soupes populaires. On y sent du vécu, de la compassion et de la solidarité de l'auteur pour ce peuple de misère. Pourquoi Dorothy, la fille du pasteur, se trouve dans cette situation ? Pour le savoir lisez ce bouquin, ça change de 1984. À la fin du livre 375 à 378 la perte de la foi et les conséquences dont celle de l'absence de changement dans le quotidien, même si celui-ci est baigné dans les fonctions religieuses. Et vive l'aspidistra ! Chez ChampLibre-Ivréa 10-18 Épuisé Il y a du vécu là dedans : le travail de bibliothécaire, les pensions de famille infâme, les travaillistes bon teint charitables et condescendants, la mouise ... Un gars qui honnit le dieu argent, mais en est obsédé de cet argent. Déjà à l'époque, l'Amérique c'est des sodas, de la théosophie ! En 1936 page 320 « ... Retrouvez ce teint de pêche sur un matelas « beautérepos ». Seule une crème de beauté pénétrante atteindra la saleté sous l'épiderme… Une brosse à dents rose, voilà ce qu’elle cherche. Comment alcaliser votre estomac presque instantanément… L'album « rapidculture » de renommée mondiale. Ce n'est qu'un commis voyageur et cependant il cite Dante. Seigneur, quelles niaiseries ! Mais, évidemment, c'était un Journal américain. Les Américains arrivent toujours bons premiers pour n'importe quelle sorte de saloperie, qu'il s'agisse d'ice-cream soda, d'entreprises de gangsters ou de théosophie. » Ha il a oublié Alice Baley anglaise sa contemporaine qui a fait la théosophie son fond de commerce. Un article de Christophe Ono 24 avril 2000 : https://www.chronicart.com/livres/george-orwell-et-vive-l-aspidistra/ «Respirez. Loin des souvenirs mi-figue mi-raisin de la guerre d’Espagne (Hommage à la Catalogne) ou des paraboles dénonçant le totalitarisme sous toutes ses formes (1984, La Ferme des animaux), nous voici embarqués pour une contrée orwellienne beaucoup plus paisible en apparence : celle des « aspidistras », curieuses plantes d’appartement dont nous ne saurons rien sinon qu’elles possèdent des feuilles charnues d’un vert sombre et qu’il est absolutely impensable que tout foyer anglais qui se respecte n’en ait pas une, en pot, sur sa table de salon. Malgré son titre euphorique, Et vive l’aspidistra ! (Keep the Aspidistra Flying) relate la descente aux enfers d’un jeune homme de trente ans qui, pour mieux « déclarer la guerre au dieu Argent et à tous ses pourceaux de prêtres », quitte un emploi rémunérateur (la publicité, en l’occurrence) pour se consacrer à la poésie, activité sacro-sainte qu’il ne parvient d’ailleurs pas à mener à bien. Mais, parce que l’on sait bien que les plus farouches dénégations cachent souvent d’indéracinables obsessions, le comportement de Gordon est entièrement dicté par la hantise de l’argent qu’il n’a pas, même s’il se refuse absolument à en gagner. Si l’argent « pourrit tout », c’est bien dans ce roman, même si l’expression n’a pas le sens qu’on lui prête d’habitude : ainsi, Gordon, pourtant fauché, se prive d’un dîner en compagnie de la touchante et compréhensive Rosemary parce qu’il n’accepte pas de « vivre à ses crochets », lui annonce-t-il tout de go. Du coup, chacun rentre chez soi. Manque-t-il quelques shillings pour un billet de train ? Il refuse l’aide d’un ami fortuné et annule un week-end avec Rosemary. Gordon fait donc du manque d’argent la cause de tout, y compris de ses absences amoureuses : « Ce n’est pas que je n’aie pas envie de faire l’amour avec toi, si, j’en ai envie. Mais je t’assure que je ne peux pas faire l’amour avec toi quand je n’ai que huit pence en poche. Du moins, quand tu sais que je n’ai que huit pence. Je ne le peux tout bêtement pas. C’est physiquement impossible. » Le récit, bien que caustique -Orwell éreintant avec un humour féroce un personnage qui n’est pas s’en rappeler les débuts difficiles de l’auteur (cf. La Dèche à Paris et à Londres)-, pourrait n’être que la peinture d’une bohème triste et monotone, s’il ne se produisait au milieu du roman le déclenchement d’un ressort ingénieux du type « l’arroseur arrosé » : voici notre Gordon devenu riche grâce à la poésie : « Ca paraissait une folie contre nature, en cette année de disgrâce 1934, qu’il y eût quelqu’un pour payer cinquante dollars un poème. » Dès lors, le récit s’emballe pour culminer dans un morceau de bravoure d’une cinquantaine de pages en forme de passage initiatique à partir duquel, seulement, Gordon pourra trouver la rédemption et faire enfin l’amour à sa belle, dans les règles de l’art, après avoir jeté ses poésies au ruisseau. Une amusante glissade dans le sordide débouchant sur un champ de fleurs, si toutefois les aspidistras fleurissent.» Dans la dèche à Paris et à Londres Aux éditions 10-18 ou ChampLibre-Ivréa Et édition de 1935 à la NRF titré La vache enragée avec une préface Panaït Istrati 1984 Tiré de la Revue des deux mondes Décembre 2020 Orwell et la common decency - Traduire George Orwell - Frédéric Verger En pdf sur unprolospecule Une courte mise au point «...ce qu’O’Brien, dans la suite du roman, va tenter de détruire chez Winston, ce n’est nullement a conviction de la vérité objective que deux et deux font quatre mais sa conviction morale qu’affirmer une vérité objective ou faire preuve de loyauté sont des valeurs éthiques supérieures à celles que prône le Parti. Peu importe qu’on ait la possibilité de penser qu’objectivement deux et deux font quatre si on accepte que le fait de dire que deux et deux font cinq est moralement préférable. Pour que Winston en soit convaincu, O’Brien va l’humilier jusqu’à détruire l’idée qu’il se faisait de lui-même comme pouvant toujours dire la vérité ou refuser de trahir. Aucun homme que la torture a forcé à trahir ne peut plus croire en la loyauté. Et à partir de là s’effondre la croyance même en le fait qu’il existe des vérités morales objectives, extérieures à la subjectivité, qui ne pourront jamais être détruites ou transformées. Ce qu’une société a produit, une autre pourra le défaire. La croyance qu’il existerait des vérités morales objectives qui nous permettraient d’échapper au dressage et à la transformation sociale des mentalités est dangereuse car elle nous empêche de voir que le monde de demain peut ressembler à celui d’O Brien sans qu’aucune vérité morale objective puisse renaître pour nous en sauver. Voilà, selon Richard Rorty, la morale simple et terrible de 1984.» Haut de page Page Orwell Des visites régulières de ces pages mais peu de commentaires. 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