Sortir de l'histoire officielle

     


Déterminisme-causalité / contingence

Contraire, opposé au : destin, fatalité, téléologie, messianisme, dessein
Ils tireraient, le déterminisme nous pousse.

IProp26 «Une chose qui est déterminée à agir d'une certaine façon fut nécessairement déterminée ainsi par Dieu; et ce qui n'est pas déterminé par Dieu ne peut se déterminer soi-même à agir.»
IProp28 Description d'une chaîne de causes.
Pour BS tout serait déterminé : IProp29Démo«... tout est, par la nécessité de la nature divine, déterminé non seulement à exister, mais encore à exister et à agir selon une modalité particulière, et il n'y a rien de contingent.» C'est embêtant. En poussant un peu plus nous arrivons à un fatalisme à rebours. Je veux bien entendre une prise conscience des causes, pas toujours connues, qui nous mènent mais en en prenant conscience je souhaite rediriger mon cheminement.
IProp33 Il confirme ses dires dans ce sens.
et la fin de son Scolie1 (note 70 page 441) en supprimant les négations : l'ordre des causes, même si ceci nous ne nous en apercevons pas, est nécessaire et impossible. Le contingent et le possible ne sont que la marque de notre ignorance.

Entre le passé et le futur s'ouvre un présent étendu séparé par la causalité "Voyage au cœur de l'espace-temps" de Stéphane d'Ascoli et d'Arthur Touati - 2021 - chez First éditions pages 50 et 51

Gérald Bronner-Chantal Jaquet : ça passe ou ça classe !
Propos de Chantal Jacquet
« Il est bien difficile de démêler ce qui nous est strictement personnel, puisqu’un individu est inséparable du nœud de relations qui le constituent. Par conséquent, le mérite ne renvoie à rien d’intrinsèque. Cela ne signifie pas que nous n’avons pas des qualités qui se renforcent par des efforts et des échanges avec le milieu. Compte tenu du coefficient d’adversité et des obstacles rencontrés, on peut reconnaître, dans certains parcours, du courage, de la combativité, un dépassement de soi… qui fondent l’estime de soi. Mais pourquoi ramener cette complexité à du simple « mérite » ? La notion implique une forme de récompense distinctive qui a pour revers l’exclusion des déméritants.
...
le mérite est une construction théologique et politique, qui n’a de valeur que dans l’état civil. Il n’a aucun fondement ontologique. À l’état naturel, il n’y a ni mérite ni faute.

Le mérite a d’abord été une fiction utilisée par la petite bourgeoisie pour contester les privilèges de la naissance et faire valoir des qualités propres contre l’héritage. C’était un instrument de libération. Mais il peut aussi être utilisé pour asservir et dominer. ... l’une des premières mesures prise par le gouvernement d’extrême droite en Italie [est] l’institution d’un ministère « de l’instruction et du mérite »
Et la démocratie
Si l’on veut fonder une démocratie, il faut sortir des podiums et s’efforcer de rendre justice à chacun, ce qui suppose une redistribution de tous les capitaux, économiques, culturels mais aussi symboliques. L’objectif n’est pas tant d’encourager les individus à être méritants ou à se distinguer au détriment des autres, parce qu’une société où l’on vit sans arrêt de compétition produit du ressentiment. L’essentiel est de faire en sorte que chacun puisse aller au maximum de ce qu’il peut et exprimer sa puissance d’agir au mieux, afin de se sentir reconnu.
... le déterminisme n’empêche pas la liberté ! Il ne faut pas le confondre avec la fatalité. C’est d’ailleurs la grande leçon de Spinoza : on devient libre non pas en échappant aux déterminismes mais en sachant ce qui nous détermine. De ce savoir, on tire une puissance d’agir.
On peut produire du changement dans les comportements et imaginer fléchir ces tendances statistiques en fonction des discours et des pratiques. On peut ainsi encourager l’émulation plutôt que la compétition.
... l’émulation implique un « concours » au double sens du terme : on se mesure à l’autre et on se prête main-forte. La compétition repose au contraire sur le chacun pour soi, l’opposition de l’élu et de l’exclu. Le modèle compétitif conduit à la rivalité afin d’écraser l’adversaire. Le modèle fondé sur l’émulation vise moins le dépassement des autres que le dépassement de soi. Il repose sur la stimulation réciproque pour augmenter la puissance d’agir de chacun.»

Frédéric Lordon - Les affects de la politique
Désespérant déterminisme ?
On ne niera pas que le problème se posait. . . C'est qu'il ait été convenablement résolu par cette restauration qui est plus discutable. Pourtant - à leur corps défendant ? -, même des figures qu'on pourrait assimiler à l'humeur structuraliste semblent l'avoir validée à leur manière. N'est-il pas symptomatique de retrouver la même évocation sous la plume de Braudel et de Bourdieu qui, dans un registre relâché et comme en marge de l'élaboration théorique, se laissent aller à « estimer » les marges que le poids des structures laisse à la liberté humaine : « notre petite marge de liberté ... pour échapper aux lois, aux nécessités, au déterminisme », dit Bourdieu, « 5 % de liberté », évalue Braudel au doigt ... mouillé contre les rapports sociaux qui pèsent pour tout le reste. « Petite marge » ou « 5% », c'est donc que la liberté conserve quelques interstices sans lesquels le changement historique n'aurait aucune ressource ni aucune chance. Ainsi, même des penseurs qui ont su faire face au poids des déterminismes n'ont pas pu renoncer aux « marges de la liberté » - et passer des déterminismes au déterminisme. Ceci peut-être parce que, du déterminisme, ils ne se sont donné qu'une version qualifiée : « les déterminismes sociaux», et non le déterminisme tout court. Spinoza, pour sa part, ne transige pas. Il y a le déterminisme et rien d'autre. Au demeurant, ça ne peut pas être une question quantitative. La « liberté » pose un problème philosophiquement identique qu'elle soit réduite à des marges ou supposée intégralement régnante. Et, dans l'épaisseur de ce problème, Spinoza tranche avec conséquence. ... ce sont plutôt les défenseurs du libre arbitre qui ont à s'expliquer. Comment l'homme pourrait-il justifier d'être « comme un empire dans un empire » ? Quelle sorte de fondement pourrai t-il donner à sa revendication d'échapper à la causalité phénoménale qu'il réserve à toutes les autres choses de l'univers ? Par quel miracle peut-il par fois s'exonérer de l'enchaînement des causes et des effets ? Comment prétend-il authentiquement briser le cours des choses … c'est-à-dire produire des effets sans cause ? « La volonté ne peut être appelée cause libre, mais seulement nécessaire », leur répond Spinoza(Éth., I, 32) - y compris celle de Dieu qui « n'opère pas par la liberté de la volonté » (Éth., I, 32, cor. I), mais par la nécessité de sa nature. Et le corollaire II d'enfoncer le clou : « car la volonté, comme tout le reste, a besoin d'une cause qui la détermine à exister et à opérer d'une manière précise ». C'est bien tout ce à quoi l'humanisme ne veut pas se rendre, lui qui tient à l'éminence ontologique de l'homme et reflue la condition à la quelle le ramène Spinoza : celle d'une chose parmi les choses. Pour son malheur, Spinoza ne fait pas que tirer le tapis sous ses pieds pour restaurer la cohérence de la nécessité de toute chose : il réengendre génétiquement l'illusion de la liberté elle aussi nécessaire ! - et renvoie la revendication de l'exception au registre de l'imagination égarée : « les hommes se trompent en ce qu'ils se pensent libres, opinion qui consiste seulement en ceci qu'ils sont conscients de leurs actions et ignorants des causes qui les déterminent » (Éth. , II, 35, scolie).
Moment d'accablement ... si tout est écrit, alors à quoi bon ? Annulation de la politique : nous n'avons plus rien à faire puisque tout est déterminé … Évidemment, le contresens est complet. Car il ne se passera que ce que nous aurons fait ... en ayant été déterminés à le Faire. Et si nous avons été déterminés à ne rien faire, il ne se passera rien. ... Lorsque le désir d'action est impérieux, il se donne cours et se moque bien de savoir si l'action est libre ou nécessaire, si le déterminisme est un fatalisme, ou quoi que ce soit de ce genre. Et si ce désir est impérieux, c'est qu'il a été déterminé avec ce qu'il faut d'intensité. L’expression courante qui dit « c'était plus fort que moi » n'en restitue-t-elle pas à sa manière la nécessité ? En réalité, montre Spinoza, mis à part la troncature imaginaire produite par l'ignorance des causes qui nous déterminent, nous sommes d'autant plus portés à croire en la contingence et en notre liberté de choix que la balance des affects en nous est tangente. l;un des deux affects opposés en balance l'emporte mais de peu, ou bien un affect est là tnais modéré et susceptible d'être aisément défait, et c'est cette indécision, ou ces faibles intensités passionnelles, qui nous ont donné l'impression fausse d'un libre décret de l'esprit, là où le primat écrasant d'un affect était plus fort que nous ». De là que les hommes « croient, pour la plupart, que nous ne faisons librement que ce à quoi nous aspirons légèrement, parce que l'appétit pour ces choses peut aisément être réduit par le souvenir d'autre chose que nous nous rappelons fréquemment, et que nous ne faisons pas du tout librement ce à quoi nous aspirons avec un grand affect et que le souvenir ne peut apaiser » (Éth., III,2, scolie). Mais qu'une détermination l'emporte de peu ou de beaucoup, c'est toujours une détermination.

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