Sortir de l'histoire officielle

    


Les révolutions russes
Luttes et dévoiement


L'un des trois était déjà un brigand, mais là n'est pas le problème puisque après 1917 les bolchéviques les utilisaient pour pénétrer les groupes d'opposants qui n'étaient pas en priorité les capitalistes, la noblesse ou l'église.

 Après avoir entendu, lu et vécu de l'intérieur la propagande communiste (bolchévique, trotskiste ...) et lu des analyses sur la gestion de Kronstadt en 1921 et l'Ukraine de 1918 à 1921 je considère que les dirigeants bolchéviques et leurs appareils, par ignorance ou par malhonnêteté, sont responsables du stalinisme et de ses meurtres. Je ne suis pas anarchiste mais de plus en plus convaincu par l'autogestion et le fédéralisme.
  Vous lirez, à part la propagande officielle, des articles opposés à cette vision mais les propos sont liés à la situation de l'auteur. Par exemple Victor Serge, suivant qu'il était sur place ou expulsé vers l'ouest, son point de vue sur Kronstadt a changé passant dans sa biographie de Trotski d'une condescendance pour des révoltés en dehors du coup à une vision négative sur la répression sanglante dirigée par ce Trotski.
  Comment ces intellectuels, Lénine, Trotski, Staline ..., victimes du tsarisme et tenant des propos socialistes ont désiré le pouvoir exclusif de leur groupe ? Est-ce par le dogme de la dictature d'un prolétariat paradoxalement très réduit dans la Russie de 1917, ou le pouvoir pour le pouvoir et son confort ? Il fallait à tout prix gagner cette guerre civile car la répression les aurait écrasés et quelque soit les moyens en considérant que leur méthode était la seule. En tout cas avec la dictature d'un clan sur une population ils avaient raison de devenir paranoïaques et, après avoir supprimé toute liberté et mouvement d'opposition, éliminé tout opposant ou susceptible de l'être. Trotski, s'il ne mentait pas, s'est complètement trompé et il ne pouvait que nier, masquer et transformer la réalité. Pour lui Kronstadt et la makhnochtchina étaient des bandes d’ignares et de truands. Lisez et vous pourrez juger s'ils ne revendiquaient pas simplement l'application des réformes sociales et de liberté attendues par la révolution de 1917. Lénine, Trotski et Staline ont été des tueurs de rêves. Lire entre autre Rosa Luxembourg «La vie publique entre peu à peu en sommeil. Quelques douzaines de chefs d'une énergie inlassable et d'un idéalisme sans borne dirigent le gouvernement, et, parmi eux, ceux qui gouvernent en réalité, ce sont une douzaine de têtes éminentes, tandis qu'une élite de la classe ouvrière est convoquée de temps à autre à des réunions, pour applaudir aux discours des chefs, voter à l'unanimité les résolutions qu'on lui présente, au fond par conséquent un gouvernement de coterie - une dictature, il est vrai, non celle du prolétariat, mais celle d'une poignée de politiciens, c'est-à-dire une dictature au sens bourgeois ...». Les soviets vidés de leur fondement étaient morts.

Autre question : pourquoi cette dictature a durée 70 ans ?

Un point de vue : « La révolution d’Octobre n’est pas une révolution mais un coup d’État dans la révolution» par Réné Berthier
Quelques extraits
Un dossier du Monde Diplomatique La révolution russe en questions
Un bilan de l'édition pour le centenaire Un centenaire pour rien par Louis Sarlin

Que cache les mots ?
L'URSS (CCCP) pays soviétique, pays communiste ?
Le communisme est juste une organisation économique où les biens de production et de distribution appartiennent à la collectivité plus ou moins étendue mais pas à l'État.
Soviet veut dire simplement conseil, comme conseil municipal par exemple. A leurs créations ces conseils étaient totalement démocratiques c'est à dire que leurs coordinateurs et représentants étaient élus par les membres et juste par eux sans avis d'une quelconque autorité extérieure.
La Russie de 1917 à 1991 était simplement une dictature au main d'un groupe restreint qui par leur histoire de parti se sont nommés bolcheviks, majoritaire en russe.
Ces bolcheviks pouvaient baptiser la Russie de soviétique ou de communiste, ce qui ne voulait rien dire comme ces fameuses démocraties populaires de l'Europe de l'Est qui se sont écroulées n'étant pas réellement appuyées sur une base populaire.
Nous devons nous méfier d'un groupe politique qui n'intègre pas la liberté dans ses fondements, celle-ci garantie par des propositions et des applications précises.
Nous devons refuser une réduction des libertés d'expression individuelle et de déplacement pour un soi-disant contexte.
Même en temps de guerre un officier peut être élu et sera aussi compétent. Sa nomination non démocratique actuelle ne garantit pas ses compétences comme nous l'avons vu en 1914 et en 1940 en France.
Je reviens aux bolcheviks. Ayant pris le pouvoir par les armes, y trouvant un confort et ayant peurs pour leur vie, en cas d’échec ont éliminé tout opposant, même ceux qui ont permis le succès de la révolution d'octobre, les anarchistes, les socialistes révolutionnaires de gauche, mencheviks (ces derniers aussi se revendiquant marxistes) et même des bolcheviks !
Les bolcheviks ont pratiqué leurs forfaits toujours cachés derrière les slogans «l'usine aux travailleurs» et «la terre aux paysans».
Pouvant ponctuellement par opportunisme s'allier avec ces groupes qu'ils écraseront ensuite.
Comme tout pouvoir oppressif les Bolcheviks ont cherché pendant leur forfait des ennemis extérieurs et intérieurs, les ennemis politiques déjà cités mais aussi entre autre les koulaks (petits propriétaires terriens) pour mieux les piller pendant la grande famine en Ukraine de 1931 à 1933 et vers la fin les juifs avec le «complot des blouses blanches».

Ce mot de COMMUNISME comme ceux de DÉMOCRATIE et d'ANARCHIE sont chargés dans leur champ sémantique (ce qui est ancré en nous au plus profond, malgré nous) de la propagande de leurs opposants.
Donc que faire de ces appellations pour une refonte de notre société tournée vers l'humain dans un environnement pérenne, hors de toute économie spéculative ?

Les mouvements révolutionnaires russes de 1882 à 1910

Cinq femmes russes qui ont consacré leur vie à renverser le tsar

Les socialistes-révolutionnaires

Anarchisme et communisme dans la révolution russe

Les paysans russes de la Révolution à la collectivisation

Terreur bolchevique et stalinienne de 1920 à 1955 - Régime soutenu par le PCF

Kronstadt

Petrograd rouge par Stephen A. Smith

Emma Goldman - Vivre ma vie (période russe)


La révolution russe par Rosa Luxemburg

Six mois rouges en Russie par Louise Bryant

Nestor Makhno

Les conseils ou soviets - Les soviets trahis par les bolchéviks

Victor Serge - Mémoires d'un révolutionnaire


Marylie Markovitch - La révolution russe vue par une Française

& Pierre Pascal russophile passionné, le rejet de la dictature bolchévik l'a mené à l'extrème droite

Ante Ciliga - Dix ans au pays du mensonge déconcertant



Et un choix de livres sur les anarchistes et la Révolution russe tiré de :
https://www.unioncommunistelibertaire.org/?Bibliographie-Pour-decouvrir-la-Revolution-russe

Les Anarchistes russes, les soviets et la révolution russe de 1917
D'Alexandre Skirda

https://www.editions-spartacus.fr/
De la 4ème de couverture et du site de l'éditeur «De l’époque des tsars et de l’Union soviétique, on retient l’image d’un peuple russe essentiellement rural, habitué à subir avec résignation des pouvoirs arbitraires le privant de toute capacité d’initiative. C’est oublier que le servage ne fut instauré en Russie que tardivement, ne trouvant sa forme définitive qu’au XVIIIe siècle pour être aboli moins d’un siècle plus tard. Imposé à une population héritière d’une tradition d’organisation collective, il suscita plusieurs révoltes gigantesques, dont celles qui accompagnèrent le mouvement de Pougatchev.
Avec l’industrialisation et l’urbanisation croissante au XIXe siècle, des groupes anarchistes apparurent en Russie ; dans l’exil, certains de leurs animateurs, comme Michel Bakounine ou Pierre Kropotkine, devinrent des figures marquantes du mouvement socialiste international.
En 1917, les anarchistes furent les partisans les plus résolus d’une société fondée sur le pouvoir des soviets – ces conseils de délégués librement élus qui avaient surgi pour la première fois dans l’histoire contemporaine lors de la révolution de 1905. Mais leur conception de ce pouvoir, et du rôle des comités d’usine mis en place par les ouvriers, se révélait en totale opposition avec celle des bolcheviks, qui entreprirent de détruire les groupes anarchistes dès le printemps de 1918.
Alexandre Skirda, après avoir replacé l’action et la doctrine des anarchistes dans l’histoire longue de la Russie, restitue leur rôle dans la révolution de 1917 et expose les raisons et les formes de leurs affrontements avec le pouvoir bolchevik. Il leur donne aussi largement la parole dans une série de textes datant de 1918 à 1927.
À travers la lutte menée par les anarchistes pour l’autonomie des comités d’usine, des soviets et des communes contre la centralisation étatique s’éclairent parfaitement la conception bolchevique du « pouvoir soviétique » et les fondements d’un régime qui ne pourra maintenir sa dictature sur l’ensemble du peuple que par la violence.»

Un article : http://dissidences.hypotheses.org/8765
En pdf : Revolution%20russe/dissidence%20anarchises%20russes.pdf


Plus édité - Jacques Baynac, Les Socialistes-révolutionnaires


Plus édité René Berthier, Octobre 1917 : le Thermidor de la Révolution russe

http://www.cnt-f.org/editionscnt-rp/octobre-1917-le-thermidor-de-la,38
«Il y a 80 ans, un événement d’une ampleur jamais vue allait bouleverser le monde et orienter durablement le destin de la classe ouvrière internationale. Le prolétariat russe et l’énorme masse paysanne ont renversé le tsar de toutes les Russies et établi un système fondé sur les conseils ouvriers et paysans.
Il existe de nombreuses histoires de la Révolution russe. On trouve, en quantités moins importantes, des livres sur les anarchistes et la Révolution russe.
Dans le premier type d’ouvrage, les anarchistes n’apparaissent pas du tout, ou très marginalement. Dans le second type d’ouvrage, qui tente de rendre justice au mouvement libertaire, le travail de restitution du rôle des anarchistes tend à ne pas mettre leur activité en relation avec le déroulement général de la révolution et des problèmes qu’elle a posés. On sait que ce sont les vainqueurs qui écrivent l’histoire.
La mythologie fondée par les bolcheviks et leurs héritiers a eu pour fonction de masquer la réalité, l’extra-ordinaire vitalité et diversité des expériences que les acteurs de cette révolution ont tenté de mettre en place...»
Un article Revolution%20russe/Thermidor%20de%20la%20Revolution%20russe.pdf

La révolution russe par Rosa Luxemburg
Les éditons de l'aube

Le texte en ligne

Une analyse
«À la suite de la révolution de novembre 1918 en Allemagne qui renverse l’empereur Guillaume II, les spartakistes lancent une insurrection en janvier 1919 à Berlin afin de transformer la République bourgeoise en République populaire. Le SPD alors au pouvoir réprime violemment la révolte et fait assassiner ses deux principaux instigateurs, Karl Liebknecht et Rosa Luxemburg. Staline condamnera par la suite Rosa Luxemburg en tant qu’ennemie des bolcheviks et son œuvre figurera sur la liste des ouvrages interdits par le pouvoir soviétique, plus bel hommage pouvant être rendu à cette adversaire acharnée des dogmatismes de toutes sortes.»
En pdf : Revolution%20russe/R%20Luxemburg%20la%20revolution%20russe.pdf

Remarques et extraits tirés du texte de Rosa Luxemburg :
Page 7 « ... la social-démocratie allemande s'est efforcée, dès le début, de justifier la campagne de conquêtes de l'impérialisme allemand, à savoir la mission réservée aux baïonnettes allemandes de renverser le tsarisme et de délivrer ses peuples opprimés.»
p23 «Les bolcheviks sont les héritiers historiques des "niveleurs" anglais et des jacobins français.» Les niveleurs anglais ? https://fr.wikipedia.org/wiki/Niveleurs
p24 On y arrive à ce souhait «l'une des conditions indispensables de cette transformation, c'est de supprimer l'opposition entre l'agriculture et l'industrie, qui constitue le trait caractéristique de la société bourgeoise, pour faire place à une pénétration et à une fusion complète de ces deux branches de production» On voit aujourd'hui les catastrophes sur l'environnement qu'entraîne cette fusion. On peut dire pour elle que les enjeux environnementaux à l'époque n'étaient pas aussi prégnants.
p24 Elle souligne l’opportunisme de Lénine et compagnie par leur revendication «... droit des différentes nations de l'empire russe à décider elles-mêmes de leur propre sort...» «... en contradiction flagrante, tant avec le centralisme, si souvent affirmé, de leur politique, qu'avec leur attitude à l'égard des autres principes démocratiques. Tandis qu'ils faisaient preuve du mépris le plus glacial à l'égard de l'Assemblée constituante, du suffrage universel, de la liberté de la presse et de réunion, bref de tout l'appareil des libertés démocratiques fondamentales des masses populaires ...»
p39-40 L'opportunisme stratégique de Lénine et compagnie apparaît clairement dans leur volte face vis à vis de l'assemblée constituante revendiquée par opposition au gouvernement Kerensky et sa dissolution en novembre après leur prise du pouvoir.
p44 Je ne connaissais pas cette histoire de l'Angleterre «... on voit des parlements réactionnaires ou très modérés, élus sous l'ancien régime par un suffrage restreint, se transformer soudain en porte-parole héroïques de la révolution, en organes de l'insurrection. L'exemple classique, c'est le fameux "Long parlement" en Angleterre, qui, élu et réuni en 1642, resta sept ans en fonctions, et refléta successivement tous les changements de l'opinion publique, des rapports des classes, du développement de la révolution, jusqu'à son point culminant, depuis la timide escarmouche du début avec la Couronne sous le contrôle d'un speaker "à genoux", jusqu'à la suppression de la Chambre des Lords, l'exécution de Charles I° et la proclamation de la république !»
p54 Un système mit en place par Lénine et Trotsky berceau du stalinisme «La vie publique entre peu à peu en sommeil. Quelques douzaines de chefs d'une énergie inlassable et d'un idéalisme sans borne dirigent le gouvernement, et, parmi eux, ceux qui gouvernent en réalité, ce sont une douzaine de têtes éminentes, tandis qu'une élite de la classe ouvrière est convoquée de temps à autre à des réunions, pour applaudir aux discours des chefs, voter à l'unanimité les résolutions qu'on lui présente, au fond par conséquent un gouvernement de coterie - une dictature, il est vrai, non celle du prolétariat, mais celle d'une poignée de politiciens, c'est-à-dire une dictature au sens bourgeois ...»

Ante Ciliga - Dix ans au pays du mensonge déconcertant

http://www.editions-ivrea.fr/
Du site de l'éditeur «En 1936, après trois ans de prison et deux ans et demi d’exil en Sibérie, Ante Ciliga est à Paris où il écrit la première partie de son livre, Au pays du grand mensonge, publié en 1938, auquel fait suite une deuxième partie, Sibérie, terre de l’exil et de l’industrialisation, achevée en 1941 et publiée en 1950.
Dix ans au pays du mensonge déconcertant réunit en un seul volume ces deux ouvrages parus à douze ans d’intervalle qui relatent dans leur suite chronologique l’expérience des dix années – de 1926 à 1936 – vécues par l’auteur en U.R.S.S.
Ce témoignage d’un révolutionnaire relate conjointement la résistance opiniâtre du prolétariat russe et la lutte obstinée pour la vérité d’un homme confronté à la bureaucratie stalinienne.
Ciliga, emprisonné puis exilé pour n’avoir pas cédé aux injonctions de la bureaucratie, y dresse un tableau de la vie et de l’activité carcérales et d’exil et révèle son effroyable réalité : « La prison est devenue le seul endroit en Russie soviétique où les gens s’expriment de façon sincère et ouverte ». En prison, cet ex-dirigeant communiste démonte avec une grande lucidité les vaines querelles des opposants intellectuels à propos de « l’État ouvrier » et tranche : «  Le trotskysme est une opposition dont le but est d’améliorer le système bureaucratique et non de le détruire… Trotsky est au fond le théoricien d’un régime dont Staline est le réalisateur. » Mais Ante Ciliga ne s’arrête pas là et en vient à critiquer le léninisme. Il conclut : « La légende de Lénine est un mensonge qui sert à couvrir les crimes de la bureaucratie. »

René Berthier : « La “révolution d’Octobre” n’est pas une révolution mais un coup d’État dans la révolution »
«...l’accession au pouvoir des bolcheviks est la pire chose...»

Mots, idées, concepts, personnalités repérés : L'Allemagne, les anarchistes et la révolution, instrumentalisation de la révolution russe, mise en place de la bureaucratie, les soviets, octobre est un cout d'État, la paysannerie, thermidor
«... la révolution russe elle-même qui est un enjeu politique. ... différents courants politiques ont donné leur propre interprétation à des événements qui ont été instrumentalisés, et ce pendant longtemps. C’est moins le cas aujourd’hui dans la mesure où cet événement considérable a perdu beaucoup de son importance et de sa fonction mythique.
On a plaqué sur les événements consécutifs à Février, puis à Octobre 1917, des grilles de lecture divergentes en attribuant les succès ou les échecs à l’application ou à la non-application de telle ou telle ligne politique (on a un peu ça dans le cas de la Commune de Paris, également).
La social-démocratie parlementaire attribue l’échec de la révolution à la destruction des institutions démocratiques issues de la révolution dite de Février, notamment à la dissolution de l’assemblée constituante. Ce courant oublie de préciser que les socialistes voulaient continuer la guerre et refusaient de convoquer l’assemblée constituante, deux faits qui ont contribué de manière déterminante au soutien des masses envers les bolcheviks, qui axaient leur propagande sur la nécessité de mettre fin à la guerre et qui critiquaient de manière lancinante les socialistes qui refusaient de convoquer l’assemblée constituante. Les différentes écoles communistes, de leur côté, réclament à leur seul profit l’héritage de Lénine, évoquent les soviets avec une ferveur religieuse mais omettent de dire que la notion de soviet était tout à fait contraire à la doctrine social-démocrate, mencheviks et bolcheviks réunis ; que les bolcheviks s’y sont ralliés tardivement et de manière tout à fait opportuniste. Quand Lénine a imposé au parti éberlué le mot d’ordre « Tout le pouvoir aux soviets », en avril 1917, certains de ses camarades ont cru qu’il était devenu bakouninien. En outre, les soviets, qui n’étaient rien d’autre que des comités de grève qui se sont plus ou moins fédérés, se sont très rapidement bureaucratisés.
Pour avoir conscience de ces faits, il ne faut pas se référer à des approches idéologiques mais à des approches historiques fondées sur des archives de l’époque. L’approche idéologique remplace les faits par l’idée qu’on se fait des événements. Il s’agit d’une pétrification de la réalité historique par l’idée qu’on veut imposer de la réalité, au nom d’un dogme. L’Histoire est réécrite à partir d’interprétations, d’analogies avec des événements survenus antérieurement (la Commune de Paris, par exemple) ou de citations de Marx qu’on force à coller aux événements.»
« Le courant anarchiste gagnerait lui aussi à abandonner l’approche idéologique et à examiner les faits : le mouvement anarchiste en Russie était dans un état de division et de confusion extrêmes, à l’image même du mouvement français. »
Les anarchistes n’ont pas manqué eux non plus de mythifier la révolution russe, mais leur attitude consista surtout à insister sur les “méchants bolcheviks” qui ont accaparé la révolution. L’analyse anarchiste se limite souvent à l’idée que les bolcheviks étaient des “autoritaires”, un concept parfaitement inopérant, selon moi, pour expliquer un phénomène historique. Le mouvement libertaire insista surtout sur les événements spectaculaires — l’“épopée” makhnoviste ou l’insurrection de Kronstadt — et beaucoup moins sur les aspects institutionnels de la révolution [1]. Le courant anarchiste gagnerait lui aussi à abandonner l’approche idéologique et à examiner les faits : le mouvement anarchiste en Russie était dans un état de division et de confusion extrêmes, à l’image du mouvement français. Ainsi, lors d’un congrès tenu à Karkov en juin 1917, anarchistes syndicalistes et anarchistes communistes s’étaient opposés sur tous les problèmes : poursuite de la guerre, contrôle ouvrier, participation aux soviets, mode de fédération des comités. La plus grande erreur du mouvement libertaire russe a sans doute été l’état de conflit permanent entre l’anarchisme et l’anarcho-syndicalisme naissant, qui commençait – trop tard cependant – à prendre son essor.
Les historiens libertaires de la révolution russe prennent généralement la date de février 1917 comme la véritable révolution. Quand la faites-vous débuter pour votre part et pourquoi ?
Les auteurs libertaires prennent février pour début de la révolution russe parce que c’est à ce moment-là qu’elle a commencé, tout simplement. Anarchistes et paysannerie
... la “révolution d’Octobre” n’est pas une révolution mais un coup d’État dans la révolution.»
« Selon moi, Octobre est un coup d’arrêt brutal à un processus qui devait aboutir logiquement à la décision du IIe congrès panrusse de se saisir du pouvoir, ce que le coup d’État bolchevique a empêché. »
Il y a largement de quoi appeler ça une révolution, même si, effectivement, ce n’est pas la révolution prolétarienne : celle-ci résultera de l’approfondissement de la révolution et de la politisation accrue des masses travailleuses. Selon moi, Octobre est un coup d’arrêt brutal à un processus qui devait aboutir logiquement à la décision du IIe congrès panrusse de se saisir du pouvoir, ce que le coup d’État bolchevique a empêché.»
«Vous qualifiez Octobre 1917 de « thermidor russe », pouvez-vous expliquer pourquoi ?
Il faut expliquer le sens du concept de “thermidor”, qu’on trouve chez Marx et Bakounine. Ce terme désigne une étape de la Révolution française qui a vu le transfert des pouvoirs de certains groupes de la Convention vers d’autres, ouvrant la voie à Napoléon Bonaparte et marquant la fin de la transformation révolutionnaire. Dans ses Trois conférences aux ouvriers du val de Saint-Imier, Bakounine parle de « coup d’État réactionnaire de thermidor ». Un terme est associé à « thermidor », c’est celui de « bonapartisme », qui désigne le régime autoritaire consécutif à la réaction thermidorienne. L’analogie entre le coup d’État d’Octobre et thermidor est donc logique : c’est un coup d’arrêt à la révolution. Marx utilisa le concept de “bonapartisme” mais pas Bakounine, qui lui préférait celui de “césarisme”, mais les termes sont à peu près synonymes chez les deux auteurs.
C’est Karl Kautsky qui, le premier, associa le bonapartisme et le bolchevisme. Très minoritaires, les bolcheviks ne purent s’imposer que par la violence la plus extrême contre la classe ouvrière. Ils furent à l’origine d’une contre-révolution thermidorienne, « celle qu’emprunta Napoléon Ier le 18 Brumaire 1799, puis son neveu, le troisième Napoléon, le 2 décembre 1852, et qui consiste à régner à l’aide de la supériorité d’une organisation centralisée sur la masse inorganisée du peuple et également à l’aide d’une supériorité militaire… » (Karl Kautsky, La dictature du prolétariat, 1918)»
«Le soviet de Petrograd vota le 31 août 1917 une résolution en faveur du pouvoir des soviets. Le même jour, 126 soviets de province en firent autant. Un nouveau præsidium du soviet de Petrograd est élu qui donnera la présidence à Trotski. Le 5 septembre, Moscou vota pour le pouvoir des soviets, suivis de Saratov, Kiev, Ivanovo-Voznesensk, et de nombreux autres centres industriels. Lénine était toujours dans la clandestinité, alors même que son parti contrôlait les deux principaux soviets du pays. Partout, les votes des soviets locaux exigeaient que le comité exécutif central du soviet prenne le pouvoir. À première vue, les choses se passaient donc bien : les soviets se trouvaient dans une situation idéale pour prendre en main, de manière concertée, le sort de la révolution – point de vue partagé par la majorité des bolcheviks.
Le IIe congrès panrusse (c’est-à-dire de toute la Russie) des soviets allait poser le problème de la prise du pouvoir par les soviets – un point de l’ordre du jour dont il n’était pas douteux qu’il allait être accepté. Lénine fit preuve à ce moment-là d’une activité frénétique pour obliger le parti à prendre le pouvoir la veille du IIe congrès des soviets, alors même que les bolcheviks y étaient majoritaires ! C’est une attitude à première vue surprenante, mais qui l’est moins si on admet que Lénine voulait à tout prix éviter que ne s’instaure une “légalité soviétique” qu’il leur aurait été ensuite difficile de remettre en cause.
« Les soviets étant des instances électives, ils allaient être composés de délégués de différents partis et la majorité pouvait varier. Or, il était hors de question de partager le pouvoir [pour Lénine]. »
En avril 1917, Lénine pensait que les Soviets devaient prendre le pouvoir avant : « Tant que les soviets ne se seront pas emparés du pouvoir, nous ne le prendrons pas » (« Rapport sur la situation actuelle et l’attitude envers le gouvernement provisoire », 14 avril 1917, Œuvres complètes, tome 24). C’est l’époque où il venait d’arriver en Russie et où il avait lancé le mot d’ordre « Tout le pouvoir aux soviets ! » Mais en septembre, il a complètement changé d’avis. Il faut que le parti prenne le pouvoir d’abord : « Laisser échapper l’occasion présente et “attendre” le Congrès des soviets serait une idiotie complète ou une trahison complète », écrit encore Lénine (« La crise est mûre », 27 septembre 1917, Œuvres complètes, tome 26). Contre l’écrasante majorité de son parti, il avait décidé que le parti exercerait le pouvoir seul. De nombreux bolcheviks protestèrent contre cette idée, affirmant qu’elle mènerait à la catastrophe.
Les soviets étant des instances électives, ils allaient être composés de délégués de différents partis et la majorité pouvait varier. Or, il était hors de question de partager le pouvoir. Lénine voulait que le parti prenne le pouvoir avant le congrès des soviets, pour exercer le pouvoir en son nom. Les socialistes-révolutionnaires de gauche n’entreront (fugitivement) au gouvernement que sous la pression du puissant syndicat des cheminots. En court-circuitant le congrès des soviets, les bolcheviks se fabriquaient une popularité auprès des masses populaires. C’est dans ce sens que selon moi la “révolution d’Octobre” fut en fait un coup d’État dans la révolution.»
«Dire que Lénine fut responsable de “l’explosion de la bureaucratie” n’est pas la bonne manière de présenter les choses, à mon avis. C’est un peu schématique ! Je dirais que la bureaucratie s’est instaurée toute seule et que chaque initiative du pouvoir bolchevique pour administrer la société a contribué à l’aggraver. La révolution a créé une masse de “permanents”, ouvriers, soldats, employés qui ont été élus dans les diverses instances créées par le mouvement de masse : soviets, comités d’usine, de quartiers, gardes rouges, etc. Dans un premier temps ces militants élus conservent leur activité d’origine, mais peu à peu ils finissent par être employés à temps partiel dans leur fonction, puis à temps plein. Leur mode de vie évolue. Un groupe social nouveau apparaît, dont l’adhésion au bolchevisme est moins idéologique que pratique, mais dont la situation est indissolublement liée au nouvel État, et qui profite du fait que peu à peu les élections aux postes de responsabilité soient supprimées. Ces éléments, d’origine indiscutablement populaires, se greffent sur le corps de l’État en formation et sont solidaires du régime.
À cela il faut ajouter les membres de l’ancienne bureaucratie et du corps des officiers tsaristes, qui se rallient au nouveau régime, en petit nombre au début et en grand nombre lorsque les communistes décident de faire appel aux “spécialistes”, à partir de 1918. C’est à ce moment-là que le parti passe de 250 000 à 600 000 adhérents, alors que par ailleurs le prolétariat se détache du parti : la composition sociale de cet afflux n’est donc pas un mystère. Enfin, il y a la direction du parti bolchevique elle-même, composée presque entièrement d’intellectuels bourgeois.
L’adhésion non idéologique d’une partie importante des couches populaires de la société russe au bolchevisme s’explique par le fait que les autres partis socialistes, les dirigeants mencheviks et socialistes-révolutionnaires, ne reconnaissaient pas la légitimité des instances dans lesquelles ces couches avaient trouvé une occasion de promotion sociale. La prise du pouvoir par les bolcheviks a garanti à ces couches leur intégration dans l’appareil d’État. « Pour la première fois, les classes populaires participent ainsi massivement à l’exercice du pouvoir, et en province peut-être de façon plus frappante encore qu’à Petrograd », dit Marc Ferro dans Des soviets au communisme bureaucratique (Gallimard, 1980). Les dirigeants bolcheviks de la vieille garde du parti disposent ainsi « d’une première clientèle, organiquement liée à eux, ces hommes et femmes qui sont plus encore solidaires du régime que les ouvriers demeurés ouvriers, ou les paysans demeurés paysans, et qui, tout en bénéficiant d’avantages que leur apporte Octobre, en attribuent le mérite autant à leur propre action qu’au parti bolchevique. Il se pourrait même que ces apparatchiki aient été plus inconditionnels du nouveau régime que bien des militants bolcheviques qui n’étaient pas nécessairement en accord avec la politique de leurs dirigeants. »
La survie du régime stalinien n’aurait pas été possible par la simple terreur et s’il n’avait suscité une large adhésion. Makhno, déjà, considérait qu’une partie du prolétariat urbain trouvait son compte dans le soutien au régime [4]. Un aveu de Lénine confirme cette hypothèse : « si nous considérons Moscou – 4 700 communistes responsables – et si nous considérons la machine bureaucratique, cette masse énorme, qui donc mène et qui est mené ? Je doute fort qu’on puisse dire que les communistes mènent […] C’est eux qui sont menés. » (Œuvres complètes, tome 33). Aveu terrible… Donc les choses sont trop complexes pour qu’on puisse mettre sur le dos du seul Lénine la formation de la bureaucratie.»
«Attribuer l’échec de la révolution à un retard du pays en matière de développement économique est compréhensible, mais ce raisonnement s’inscrit dans une logique que tout le monde aujourd’hui tient pour acquise, et qui ne l’est pas forcément. En effet, cette idée se fonde sur la thèse marxienne selon laquelle le prolétariat ne pourra parvenir au pouvoir qu’à l’issue d’une période de domination politique et économique de la bourgeoisie, au terme de laquelle elle aura épuisé ses contradictions internes. Ce n’est qu’une thèse qui n’a aucune vérification expérimentale, la bourgeoisie ayant largement eu le temps, depuis 1850, d’épuiser ses contradictions internes, et il y a tout lieu de penser qu’elle ne les aura pas épuisées avant longtemps…
En outre, l’approche libertaire ne consiste pas à dire que la classe ouvrière doit accéder au pouvoir d’État, mais que l’ensemble des exploités, y compris la paysannerie, accède à un contrôle global de la société. La logique de passage n’est pas forcément la même que dans l’approche marxiste. Le schéma marxiste est fondé sur deux idées reçues : la classe ouvrière est incapable de s’organiser elle-même pour prendre en main l’économie ; la paysannerie est incapable d’envisager des formes collectives d’organisation de l’agriculture. Or, ces deux présupposés sont faux.
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Le cadre conceptuel dans lequel les bolcheviks envisageaient le rôle de la paysannerie dans la révolution est hérité de Marx et d’Engels : la disparition des paysans était pour Marx un des “miracles” de l’ère bourgeoise. En dépeuplant les campagnes, dit le Manifeste, le capitalisme a libéré « une part considérable de la population du crétinisme de la vie rurale ». Pour Engels, la destruction des paysans est la “loi naturelle” de la production capitaliste. Engels déconseille même aux socialistes de « protéger les paysans contre les prélèvements, la rapacité et les manœuvres intéressées des grands propriétaires fonciers » (Lettre à Sorge, 10 novembre 1894). Il  est vrai que si les anarchistes espagnols avaient appliqué ce principe, la CNT  [Confédération nationale du travail, NDLR] n’aurait jamais eu des centaines de milliers d’adhérents paysans. Marx avait dit que « jamais aucun mouvement communiste ne peut partir de la campagne » (L’Idéologie allemande, 1932). Affirmation historiquement fausse car le Moyen-Âge et la Renaissance sont parsemés d’insurrections paysannes dont l’une des revendications était la propriété commune de la terre. Pour Marx, la situation idéale est l’Angleterre, parce que « c’est le seul pays où il n’y a plus de paysans » (Lettre à Kugelmann, 28 mars 1870). À se demander qui nourrira les citadins quand il n’y aura plus de paysans. Proudhon et Bakounine disaient qu’une révolution n’a de sens que si les conditions de vie de la population s’améliorent immédiatement. Gaston Leval, qui était en Espagne pendant la guerre civile, nous disait : « La révolution, c’est la livraison de 20 000 litres de lait tous les matins à Madrid. » Ce n’était manifestement pas la préoccupation des bolcheviks. L’échec de la révolution est selon moi moins dû au “retard du pays en matière de développement économique et plus particulièrement industriel” qu’à l’incapacité des bolcheviks à mettre en place une politique d’alliance avec la paysannerie : Bakounine posera le problème en 1870 pendant la guerre franco-prussienne. À ceux qui objectaient que les paysans étaient des partisans forcenés de la propriété individuelle, il répondit qu’il fallait « établir une ligne de conduite révolutionnaire qui tourne la difficulté et qui non seulement empêcherait l’individualisme des paysans de les pousser dans le camp de la réaction, mais qui au contraire s’en servirait pour faire triompher la révolution » (Lettre à un Français, 1870). Les bolcheviks seront confrontés au même problème quarante ans plus tard : Bakounine ajoute d’ailleurs quelques mots qui prendront tout leur sens lors de la révolution russe : « En dehors de ce moyen que je propose, il n’y en a qu’un seul : le terrorisme des villes contre les campagnes […]. Ceux qui se serviront d’un moyen semblable tueront la révolution.»
Les expériences historiques de l’Ukraine et de l’Espagne révèlent chez les libertaires une approche radicalement différente, beaucoup plus pratique, beaucoup plus politique, pourrait-on dire. Une révolution sociale qui ne peut pas nourrir la population est immédiatement vouée à l’échec. Le rapport entre prolétariat et paysannerie ne saurait être d’ordre simplement tactique, mais d’ordre stratégique. Mieux, paysannerie et prolétariat sont deux classes intimement liées au sort de la révolution, elles y ont intérêt au même titre.
En Ukraine et en Espagne, la terre a été collectivisée sans violence là où l’influence anarchiste était forte. Dans les deux cas, les rapports entre ville et campagne n’ont pas été conflictuels. Il faut dire que le prolétariat espagnol avait bénéficié de 70 ans de propagande libertaire, qui avait expliqué inlassablement qu’il fallait s’emparer des moyens de production – les usines et la terre – et les collectiviser. Dès le lendemain de l’insurrection en Catalogne, le prolétariat et la paysannerie surent ce qu’il fallait faire. Le prolétariat et la paysannerie russes n’avaient pas la même expérience historique, les anarchistes russes ne tenant pas, comme leurs camarades espagnols, leur filiation théorique de l’expérience d’une puissante section de l’AIT [Association internationale des travailleurs, NDLR]. La propagande marxiste, par ailleurs, ne s’était jamais préoccupée de ce qu’il faudrait faire le lendemain de la révolution, en dehors de quelques considérations générales sur les nationalisations. La propagande marxiste n’a en particulier jamais tenté d’introduire dans la paysannerie la notion de collectivisation, comme ce fut le cas en Espagne.
On peut dire que, sur le plan des principes, le marxisme, toutes tendances confondues, se préoccupait essentiellement de la prise en main de l’État, qui devait réaliser par en haut la transformation de la société, alors que le projet libertaire consistait à prendre en main la société en la transformant par en bas, réalisant de ce fait l’abolition de l’État.
La collectivisation des terres en Espagne ne s’est pas seulement effectuée dans les grandes exploitations où les salariés agricoles ont exproprié les propriétaires, mais aussi dans les régions de petites exploitations où fermiers et petits propriétaires ont formé des collectivités agricoles. Un tel processus a été possible pour plusieurs raisons.
• D’une part, l’adhésion à la collectivité n’était pas obligatoire pour les petits propriétaires, mais le travail collectif, l’utilisation commune du matériel rendaient la vie beaucoup plus facile. Ceux qui n’adhéraient pas à la collectivité, appelés péjorativement “individualistes” par les anarchistes, ne bénéficiaient pas de ses avantages. Sur les terres collectivisées, la productivité du travail agricole avait augmenté. La révolution avait amélioré la situation des paysans. Ce constat explique que nombre de petits propriétaires avaient rejoint les collectivités.
• Des comités ouvriers de ravitaillement avaient été mis en place par les anarchistes, et fonctionnaient efficacement, en liaison avec les campagnes. La distribution de l’alimentation était assurée par le système de la vente directe des produits organisés par les comités des syndicats.
• La collectivisation immédiate de l’industrie, des transports, etc. avait permis une continuation de la production et évité la désorganisation de celle-ci. De ce fait, les campagnes continuaient d’être fournies en matériels dont elles avaient besoin. La productivité du travail industriel avait augmenté.
• Enfin, dans la mesure où prolétariats urbain et agricole étaient organisés en syndicats dans la même organisation, il n’y avait pas de coupure entre eux, ils débattaient, organisaient la société nouvelle dans les mêmes instances.
De tout cela, il ne résulte pas que si la révolution sociale en Russie avait été menée par les anarchistes elle aurait pu surmonter le handicap du sous-développement industriel. Comme je l’ai dit, l’anarchisme russe n’avait pas l’expérience historique de 70 ans de propagande, de lutte et d’organisation, comme c’était le cas du mouvement espagnol. Mais en plus, les courants anarchiste-communiste et anarchiste-syndicaliste y étaient en forte opposition.
Par ailleurs, si on veut développer l’industrie dans une société à 85 % agraire, il est évident qu’il faudrait d’importants transferts des campagnes vers les villes pour constituer une sorte d’accumulation primitive en vue d’industrialiser. En Russie, cette accumulation primitive s’est faite avec la plus extrême violence, faisant des dizaines de millions de morts. Pourtant, c’est une question qu’il aurait été possible de négocier avec la paysannerie – mais pour cela il fallait remplir deux conditions : être en mesure de fournir aux campagnes un minimum de produits manufacturés que les bolcheviks ont été incapables de fournir parce que leur politique a conduit le prolétariat à fuir les villes ; il aurait fallu s’abstenir d’exterminer les organisations qui représentaient la paysannerie –, le parti socialiste révolutionnaire, mais aussi l’extraordinaire réseau de coopératives qui s’était développé dans le pays, et dont on ne parle jamais.»
«...l’accession au pouvoir des bolcheviks est la pire chose qui ait pu arriver au mouvement ouvrier international. Contrairement aux idées reçues, le “socialisme dans un seul pays” n’est pas une invention de Staline, il s’est mis en place aussitôt après le Ier congrès de l’Internationale communiste (IC) lorsque les dirigeants bolcheviques se sont rendus compte que la révolution ne s’étendrait pas au reste de l’Europe. La fonction de l’IC a été de mystifier la classe ouvrière internationale et de subordonner ses organisations aux impératifs de la politique extérieure de l’Union soviétique.
L’échec de la révolution allemande a largement été la conséquence de la politique de l’Internationale dirigée par Zinoviev. Cet échec a produit la politique sectaire du parti communiste allemand qui considérait les socialistes comme des ennemis au même titre que les nazis, conduisant ces derniers au pouvoir. Le soutien de l’Allemagne nazie à Franco (et l’absence de soutien de la France, il est vrai) a été largement responsable de l’échec de la révolution espagnole. Nous sommes encore tributaires aujourd’hui de la réaction en chaîne produite par le coup d’État d’octobre 1917.»

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